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28 oct. ~ Xavier Boyer ~


l Xavier Boyer l Some / Any / New l

Xavier qui ?

Même s'il est compréhensible que le monde de la musique soit une somme de niches qui ne peuvent plaire à tout le monde, et qu'il est donc souvent fréquent que tout un chacun connaisse pas les groupes que d'autres adorent, cette réaction interrogative au sujet de la figure de proue de Tahiti 80 surprend toujours un peu, beaucoup...

Je m'arrête avant de me lancer dans un monologue sur la tristesse qu'il y a, comme on dit, à voir Tahiti 80 remplir des salles deux, trois, quatre fois plus grandes, à l'étranger qu'en France... une histoire de prophète en son pays qui fait un peu tâche, surtout quand la qualité est indéniable.

Il faut dire que le Rouennais a toujours cultivé une simplicité et une modestie, ou l'inverse, qui l'a amené à cultiver le sens du secret et de l'alias mystérieux, comme son premier disque seul sous le nom d'Axe Riverboy, anagramme de son nom.

Lors d'un récent mini-concert de test de nouvelles chansons dans un lieu Pop de référence parisien, il était apparu sous le nom de Roy X Beaver, une manière de brouiller ainsi un peu plus les pistes, au propre comme au figuré, avec un malin plaisir et un peu d'humour.

[ J'aimais l'idée de changer d'anagramme avec chaque disque...

mais il faut croire qu'Axe Riverboy était difficile à surpasser ]

Mais ça, c'était avant.

Axe Riverboy était une jolie anagramme qui allait bien avec le côté pastoral de cet album, avance Xavier. Mon nouveau disque ne sonne pas comme le premier, donc je ne me voyais pas conserver cet alias.

J'aimais l'idée de changer d'anagramme avec chaque disque, mais il faut croire qu'Axe Riverboy était difficile à surpasser. C'est mon album solo, les gens me connaissent sous mon vrai nom aussi, c'était le moment d'assumer.

C'est donc à visage découvert qu'il dévoile aujourd'hui ce Some / Any / New, qui, sans surprise, propose une série de titres ultra pops... avec un éventail à 180° de cette même pop, au sens large du terme.

Du coup, dans la série des débats sur ce que met un artiste dans sa musique et ce qu'y entend le public, au risque donc d'être complètement à côté de la plaque, le premier titre peut apparaître comme le plus Tahiti de tous.

C'est marrant, je trouve que Stockholm Syndrome est assez Axe Riverboy, car il est plus folk que le reste, s'amuse-t-il. Pour chaque album, que ce soit du Tahiti 80 ou autre, j'essaie toujours de sortir de ma routine, poursuit-il. J'expérimente souvent avec des éléments que je ne maitrise pas parfaitement. Sur ce disque, j'ai beaucoup travaillé avec des boîtes à rythmes et des synthés. C'était assez nouveau pour moi donc ça m'a donné d'autres idées, d'autres perspectives.

Une chose est sûre, je voulais faire un disque qui représente mes goûts, et j'ai des goûts variés en pop. Il me semblait aussi important de faire un disque intemporel, pour les mélodies, mais aussi la production.

Je ne veux pas être taxé de revivalisme, ni être dans l'air du temps (...) donc 180°. ça me convient !

En fait, le disque affiche une qualité et un soin dans les traitements de son et les arrangements qui n'ont rien de surprenant et le recours aux multiples couches de voix, de guitares donnent aux titres une saveur qui fait passer le recours à la boîte à rythmes pour un exercice de style plus qu'une contrainte.

... Après, il y a des vraies percussions par dessus, précise Xavier. C'est un album solo, ajoute-t-il. N'étant malheureusement pas Buddy Rich* à la batterie, je me suis rabattu sur la programmation.

[ je crois que l'album solo est quasiment un genre musical à lui tout seul ]

Je pense que les contraintes sont plutôt un atout quand on fait un disque. C'est paradoxal, je sais, mais la pop n'existe quasiment que dans un cadre couplets/refrains/ponts avec une durée assez fixe... J'aime les disques où l'on sent la vision d'un artiste. Sly Stone, par exemple, a beaucoup expérimenté avec les boîtes à rythmes, Family Affair, par exemple. Ça m'a facilité la vie, et du coup j'avais plus de latitude pour travailler les autres arrangements que je maîtrise plus, les guitares, les claviers et bien sûr les voix.

Entendre Xavier citer Sly Stone, avec le parcours d'orfèvrerie pop qu'on lui connaît, peut sembler surprenant, si ce n'est incongru, sauf à oublier l'album Fosbury, ou omettre de considérer que le folk ou la soul ne sont rien d'autres que LA musique populaire de certaines communautés, à l'instar de la pop en Angleterre... et par extension la chanson française ici.

Pour le coup, les indices donnés à la veille de cet album faisaient référence à Stevie Wonder, une référence non démentie à l'album Music of my Mind, considéré comme le premier disque que le pape de la pop noire a pris complètement en main pour tracer la route qu'il entendait suivre, un peu comme le ferait Prince dès son premier disque... prendre les choses en main pour n'être jamais mieux servi que par soi-même.

Oui. je crois que l'album solo est quasiment un genre musical à lui tout seul : Todd Rungren, Shuggie Otis, Paul McCartney, etc... J'aimerais évidemment être aussi bon que ces illustres songwriters, musiciens, producteurs. C'est marrant (d'avoir) noté la référence Prince, dit-il en référence à Song For M dont l'humeur de la chanson n'est pas sans rappeler ce que le Kid de Minneapolis avait offert à l'Irlandaise Sinead O'Connor... une chanson hommage, acquiesce-t-il, au Nothing Compares to You de Prince/Sinead... écrite avant l'injuste disparition précoce de l'auteur du sublime, entre autres, Sometimes it Snows in April.

Pour le coup, c'est assez inhabituel chez moi. j'étais plus du côté Michael Jackson par exemple. C'est encore plus vrai aujourd'hui qu'avant, mais on n'invente pas de genre musical, on recycle des idées existantes avec ses filtres personnels. J'ai toujours eu une passion pour la musique dite noire mais je peux aussi écouter des morceaux des Field Mice par exemple. Tout se rejoint à un moment.

[ je pense avoir toujours les mêmes obsessions ]

Pour ce disque, la prolongation du processus de création est passée par l'association avec Stéphane Domotic Laporte que l'on connait pour sa contribution au 3e disque de Pokett et au magnifique premier de Karaocake.

J'adorais vraiment le son de l'album Orval Carlos Sibelius, explique Xavier. Je pense que ça donnait une dimension supplémentaire aux compos. J'ai adoré travaillé avec Stéphane qui m'a aidé à finir le disque. Il a rejoué quelques parties, donné une couleur à certains sons.

À l'arrivée, il est crédité comme co-producteur. Il a fait un mix créatif (...) Il joue sur scène avec moi d'ailleurs. Il fait du clavier : deux synthés monophoniques, un pour les basses, l'autre pour les leads.

Mine de rien, le premier album Puzzle de Tahiti 80 remonte à 1999, le disque d'Axe Riverboy à 2017, et il aura fallu dix années pour qu'il revienne à une expression musicale directe et individuelle. Une éternité dans le monde actuel de l'immédiateté dématérialisée. Pour au final livrer un disque intime et simple.

J’étais le premier surpris de ce chiffre rond ! Ça semble long et en même temps ce n’est pas comme si j’avais mis 10 ans pour l’écrire, juste 6 ans... Je rigole, tempère-t-il. J’ai pris mon temps, je n’avais pas de pression et ce n’est pas non plus parce que j’étais frustré par Tahiti 80. Non, c’est vraiment du bonus, c’est pour moi... et tant mieux si les gens apprécient.

La première chose, c'est que je pense avoir toujours les mêmes obsessions : on ne peut pas dire que j'ai radicalement changé de cap depuis mes débuts. Ensuite, je pense qu'au niveau des textes, par exemple, au départ, on est plutôt dans le domaine du fantasme, on imagine des choses qui pourraient nous arriver, puis, petit à petit, on commence à écrire avec ses expériences.

Donc je dirai que c'est pour moi le plus grand changement.

* Lester Young, Nat King Cole, Oscar Peterson, West Side Story

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