13 oct. ~ Karaocake ~
l Karaocake l Rows & Stitches l
Cet album est un bijou. Tout simplement. Sous ses faux airs de caillou mal taillé, une simplicité trompeuse de chansons obsédantes, la voix frêle et les lignes de Casio dévoilent un univers qui séduit dès la première écoute et que l'on réécoute l'air de rien, ou plutôt si, l'air en tête... même sept ans après. Si ce ne sont pas les critères d'un disque réussi et intemporel !?
Owen Ashworth s'était déjà choisi comme nom Casiotone for the Painfully Alone (Un Casio pour les solitaires en souffrance). Il ne restait plus qu'à trouver quelque chose d'aussi évocateur. Ce sera Karaocake. Une jolie construction lexicale qui ne cache pas ses intentions ni le propos... entre musique cousue main et petite douceur à laquelle on réprouve d'avoir cédé...
Inutile de se raconter des histoires, elle le fait très bien toute seule. Elle ? C'est Camille Chambon, et quelques histoires de maison enfouie au fond de la forêt, comme ces Polaroïds jaunis sur les pages d'un vieil album photo, des histoires de déambulations nostalgiques, gauches et téméraires au senteur de pavés qui pourraient être ceux de Brooklyn comme de Portland, de coeurs qui souffrent, le sien et celui de l'autre, des histoires simples de relations amoureuses teintées de l'immense regret de pas l'être, simples. Rows and Stitches, littéralement... rang et points de suture. Si les points de suture sont sans équivoque, Rows peut se traduire par dispute, vacarme et querelle... Une boîte à musique en poupée russe, de bois et de chiffon.
Sous la surface calme de ce verre d'eau, passée la première gorgée, des saveurs beaucoup plus complexes et riches qu'il n'y paraît, à l'image de cette pochette en apparence innocente dont les degrés de lecture se multiplient à mesure que l'on s'attache aux détails ici ou là. Quand une image parle d'elle-même (!?).
[ Ce disque est un peu aussi l'histoire d'une nébuleuse et d'une époque ]
Car si Camille Chambon a débuté l'aventure de ce disque toute seule, Karaocake est devenu un groupe aux poches larges avec la grande hotte de Stéphane Domotic Laporte, avant que la petite équipe n'intègre Tom Charlotte Sampling Gagnaire.
Once I Was Little (...) But I Grew... (Jadis, j'étais petite (...) mais j'ai grandi), confie Camille sur Eeeerie... comme ce disque, enregistré là où sont nées ses chansons, ou presque... dans le cocon pas toujours douillet d'une maison. En l'occurrence, pour ce qui est de la mise en boîte du disque, ce sont les cocons de ses deux acolytes.
Tout le talent de ce disque est ainsi de préserver l'immédiateté et le dénuement des chansons en leur confectionnant des habits de lumières, avec boucles, batterie, basse, piano, violon, ... une richesse d'apparat avec effet miroir d'une autre richesse, intérieure, celle-ci.
Ce disque est un peu aussi l'histoire d'une nébuleuse et d'une époque, celle d'un label aujourd'hui défunt, Clapping Music, mais qui a marqué son temps avec des albums de Domotic justement; entre autres projets parallèles du musicien/producteur, mais aussi de Pokett, avec qui aussi bien Stéphane que Camille ont par ailleurs collaboré, sans oublier, et sans que la liste soit exhaustive, Orval Carlos Sibellius, Encre, The Konki Duet, et Yeti Lane.
C'est album est une maison dans laquelle on se sent bien dès le moment où l'on passe la porte... une fois passé l'émerveillement de Bodies & Minds, It Doesn't Take a Whole Week et Change of Plans, le reste déroule avec une évidence rare.
Et pour filer la métaphore de l'évidence et de la simplicité plus complexes qu'il n'y paraît, sept ans auront passé avant qu'il soit donné une suite à ces bouts de ficelles colorées et attachantes.