11 mai ~ Mayence Cyrin
l Maxence Cyrin l Novö Piano II l
Quelle modernité !! Quelle modernité ?
Le classique est-il moderne ? Qu'est-ce qui fait qu'un classique devient ?
Maxence Cyrin a de toute évidence choisi de ne pas choisir, en adaptant au piano des morceaux de musiques actuelles, modernes et éventuels futurs classiques ou déjà classés parmi les plus gros tubes planétaires de notre époque.
Entre deux albums de compositions personnelles et autres bandes son de films ou de défilés de mode, il adapte avec audace et simplicité des titres piochés dans un éventail de styles différents, à 180°.
Sa reprise de Where is My Mind des Pixies sur le premier volume de reprises novö-pianistiques a fait le tour du monde. Pour le 2e recueil de Novö Piano, il a convoqué Soundgarden comme Björk, en passant par Dominique A, Billy Idol, Flash in The Pan ou Goldfrapp, voire des titres de B.O. (Matrix, Titanic, ...). Il rend une nouvelle fois justice aux oeuvres d'autres en les déshabillant pour les embaumer de toute la magie des résonances des marteaux frappant leur corde. Il laisse l'auditeur seul sans voix face aux ondulations de l'ivoire, brisant la loi du silence pour inviter Miss Kittin sur le titre walking in the Rain des Australiens, popularisé par Grace Jones, et François-Olivier Norlogues, aka Frantic, son comparse au sein du Breakfast Club, pour ici une reprise très piano bar new-yorkais de Eyes Without a Face de l'homme au sexy rictus.
Au 19e siècle, les réductions au piano d'oeuvres pour orchestres existaient déjà et aujourd'hui de nombreux pianistes font la même chose reproduisant note pour note un répertoire rock, déclarait-il humblement au Broadway World en avril 2016. Bien que certaines fois je reste fidèle à la mélodie de voix, mon travail va plus loin. C'est une question d'adaptation du morceau, d'en tirer un vrai arrangement, de se l'approprier tout en restant l'idée originale. Je m'inspire autant de Chopin et du romantisme du 19e siècle que du modernisme du début du 20e, sans oublier de m'appuyer sur la chanson française, le jazz, la pop ou la techno. Par exemple, mon arrangement de Black Hole Sun de Soundgarden puise chez Ravel et dans le jazz, celui de Jump de Van Halen est dominé par une rythmique reposant sur une gamme par tons qui rappelle Satie ou Debussy.
Bien que la démarche soit similaire à ce que font certaines chorales, dont la Scala, pas celle de Milan, celle des frères Kolacny, le résultat va bien au-delà dans sa façon de décloisonner les genres pour proposer une rencontre entre des univers que l'on imagine irréconciliables. Le classique d'un côté, en musique noble, les musiques actuelles, présupposées dégénératives, alors que Mozart était considéré par ses contemporains comme un punk avant que le terme ne vienne décrire un vaste fourre-tout musical, et qu'avant 1930, de toutes façons, le rock n'existait pas.
L'album Drukqs de Richard D. James, aka Aphex Twin, est un bel exemple de l'extrême transversalité sous-jacente des musiques entre elles, et notamment entre techno expérimentale et classique. Le fait que Maxence Cyrin travail à un album de variations sur des thèmes de l'omni* irlandais ne surprendra donc personne.
Autant de portes d'entrée sur un univers plus vaste encore dans lequel il lui arrive de lâcher le piano pour l'orgue, le clavecin, ou le Mellotron, quand il s'agit par exemple de dresser un portrait sans âge et sans visage d'un Fantassin, moins fantaisiste qu'éperdument pop romantique.
*objet musical non identifié