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16 sept. ~ Lisa Portelli ~


l Lisa Portelli l La Nébuleuse l

Le deuxième album de Lisa Portelli est un disque fort et intime, qu'elle livre sans fausse pudeur. Un disque personnel, passionnel, dans lequel elle s'est investie entièrement.

Si son premier disque remontait à six ans en arrière, elle n'a pas pour autant disparu corps et âme, puisque, outre diverses collaborations, elle n'a jamais cessé d'écrire pendant toute cette période.

J'ai fait d'autres choses oui. J'ai arrangé un album pour enfants, pour une compagnie, raconte-t-elle, évoquant une (re)mise de pied à l'étrier après le premier album.

J'ai commencé vraiment tout doux... aussi, on a tourné de 2011 à 2013, et puis surtout, je n'ai pas arrêté de composer. J'ai dû faire l'équivalent d'un album entre les deux... J'ai beaucoup jeté, élagué. … donc au final, j'ai bossé de fin 2013 à 2016 pour cet album, ce qui est quand même pas mal, trois ans, se dit-elle, constatant le temps passé.

[ Une remise à plat de sa musique...

pour en livrer une version au plus près de ses envies ]

Dans le miroir des six années qui séparent les deux sorties se reflète une maturité en tant qu'artiste, qui s'entend dans des textes, souvent noirs, et des compositions aériennes, mais sombres, qui vont avoir tôt fait de susciter les comparaisons à d'autres artistes féminines à fortes personnalités... et elle s'en réjouit.

J'appelle ça des fantasmes. Il en faut, dit-elle. C'est pas là-dessus que je me base, mais c'est vrai que dans mes petits rêves j'aime beaucoup des artistes comme Shannon Wright... et PJ Harvey bien évidemmentDans le genre, en même que d'avoir une profondeur de propos, on sent qu'elle a un regard, une vraie distance...

C'est en même temps cérébral et totalement intuitif. Y a une vraie réflexion sur ce qui l'entoure, réagit la chanteuse à l'évocation d'un des albums les plus marquants de l'auteure anglaise, Let England Shake.

Dans le miroir que la presse ne manquera pas de lui tendre, elle la première sait y voir la mue d'une jeune fille devenue femme, qui s'est accompagnée d'une réflexion. Elle en a pris le temps et ça transparait dans ses textes et ceux d'Andoni Iturrioz. Au-delà de cette introspection, Lisa s'est attachée à une remise à plat de sa musique pour en livrer une version au plus près de ses envies et de sa nature...

Sur Le Régal, il y avait des textes largement adultes déjà, mais bon c'est vrai, à mon avis ça va être ça. Je pense qu'en terme de cohérence, il y en a plus dans celui-là, dans le sens femme ; l'autre, c'était (…) une fille qui passe à l'état de femme. C'est pour ça qu'il y avait des choses matures et d'autres moins... et en même temps, ce n'était pas non plus... laisse-t-elle planer comme pour mieux défendre l'attention qu'elle a toujours porté aux mots parfois trop exigus pour englober certaines notions.

[ L'idée, c'était de vraiment penser la musique avec les textes... ]

Les textes sont effectivement forts et font poser la question de la chronologie de construction des chansons, surtout quand celles-ci collent autant aux ambiances d'une musique qui semble taillée pour.

Je fais du yaourt, lâche-t-elle. Souvent, ça part d'ambiances sonores. J'avais vachement besoin de m'éloigner du format guitare-voix dans ma chambre où je chanterais par dessus.

Certaines mélodies sont venues vraiment dans du yaourt, dans l'idée, c'était de vraiment penser la musique avec les textes...

Y a des chansons où les textes sont vraiment forts. C'est (Andoni) qui les a écrits... comme la chanson sur l'avortement. Il est très fort pour parler de ces choses-là. Celle-là, j'avais pas la mélodie avant, c'est venu avec le texte, mais pour la plupart, il y avait la musique.

Je n'avais surtout pas envie d'être prisonnière du texte, surtout pas ! Et, en même temps, je voulais des textes forts... Andoni a écrit cinq titres sur l'album et j'en ai écrits six, détaille-t-elle.

Au final, on se retrouve beaucoup dans ce qu'on écrit. On a une écriture qui se ressemble, mais, chez lui, elle est beaucoup plus précise, beaucoup plus littéraire, descriptive. Il y a un côté où il raconte les choses de façon très premier degré, mais en même temps il laisse une distance. Moi, certains sujets, je n'aurais pas pu les traiter comme il l'a fait, avoue la chanteuse.

[ J'avais imaginé... le son de groupe hyper massif et...

la petite voix au-dessus ]

Pour la musique, j'ai pris le parti pris de ne pas utiliser du tout de sons électroniques, enfin... quasiment pas, moins que sur le précédent, explique Lisa. Les guitares passent dans des effets. Ça rajoute de la consistance. Il y a un côté plus éthéré dans les guitares mais sinon c'est du guitare-basse-batterie… et de l'orgue parfois.

Dans le travail de compo, c'est hyper important de savoir se détacher de ses goûts. J'adore (le groupe) My Bloody Valentine... mais ça n'a strictement rien à voir avec ce que je fais, parce que j'ai la voix que j'ai, tempère-t-elle rêveuse... avant de poursuivre, dans un sourire...

En fait, j'avais imaginé... Tu as le son de groupe hyper massif et tu as la petite voix au-dessus... Dans l'idée, c'est un peu ce à quoi je pensais. Bien sûr, ça ne ressemble pas du tout à ça, mais c'était un peu ça l'idée d'avoir cette voix très claire, sur un son plus massif, résume-t-elle, ajoutant une certaine envie d'accentuer encore plus les choses à l'avenir...

Le final de la chanson Longtemps invite à l'y encourager, car sous couvert, d'une entrée en matière sobrement new wave, le titre finit dans un déluge sonique qui illustre comme il se doit son propos.

Mais l'arme fatale de Lisa Portelli reste sa voix, cette voix qui semble naître et mourir, avec une attaque éthérée pour flotter au gré des notes et des ambiances, irréelle, une voix qui laisse imaginer une éducation musicale moins banale qu'il n'y paraît, un peu comme le flamenco pour Anna Calvi, en plus classique.

Ça a été le classique oui beaucoup, dit-elle. La musique sacrée, c'est venu après parce que je fais partie d'une chorale qui en chante beaucoup. C'est hyper riche comme répertoire (…) du Bach, Arvo Pärt, et ça, ça m'a beaucoup ouvert la voix.

Je pense que ma voix a changé depuis l'album d'avant. Elle a peut-être plus pris en profondeur... puis je voulais aussi plus chercher dans les graves... mais j'écoute beaucoup de choses... j'aime beaucoup Elysian Fields, Mazzy Star, des choses qui ont une cohérence, Shannon Wright, cite-t-elle à la volée.

Mais au début, c'était le classique, la guitare classique. En fait, je suis rentrée tard au conservatoire... à l'âge de quinze ans, se rappelle-t-elle. J'avais un programme de trente minutes à faire, à la fin du conservatoire, c'était le prix... donc, en effet, j'ai une culture de musique classique très très riche. Je pense qu'inconsciemment ça m'a beaucoup aidé, je pense que je travaille de manière très inconsciente, c'est-à-dire que je me suis inscrite à la chorale de chants sacrés parce que j'aimais ça, mais aussi parce que je savais que d'une certaine manière j'allais imprimer des choses dans ma façon de bosser à moi.

L'année prochaine, j'aimerais bien m'inscrire à Globe-Trotters. C'est une association à Paris où tu apprends les chants du monde. Je suis sûre qu'il suffit de le faire et que ça va s'imprimer.

[ J'aimais bien l'idée de deux personnages... cette petite voix, comme ça...

et puis tout d'un coup, derrière, cette voix un peu tarée qui arrive ]

Sur d'autres titres comme Obsession et Vers d'autres voies, le parallèle avec PJ Harvey et Shannon Wright est inévitable, ne serait-ce qu'à cause de l'utilisation de deux micros, et un jeu de voix saturées et claires... mais la comparaison n'est finalement pertinente que sur une petite poignée de titres.

Je suis contente que tu me le dises. Je ne l'ai pas fait volontairement mais si on est vraiment au cœur de ce qu'on est, on a beau être fan de gens, on ne va pas faire comme eux ! Parce qu'on n'est pas eux, déjà d'une ! Et je pense aussi que c'est pour ça que j'ai mis tant de temps (à faire ce disque)... J'ai dû accepter aussi ce que j'étais.

En rapport direct avec cette sphère d'influence, on notera que parfois surgissent des bribes de textes en anglais, mais de manière presqu'effacée.

Oui, ça, c'est quand je cherchais, au début vers 2014, explique-t-elle. Des morceaux comme ça j'en ai fait plein. C'est les premiers morceaux que j'ai faits en fait après Le Régal. J'aimais bien l'idée de deux personnages, notamment sur la Nébuleuse. J'aimais bien cette petite voix, comme ça, et puis tout d'un coup, derrière, cette voix un peu tarée qui arrive...

Sur scène c'était intéressant… au départ, c'était du yaourt... Fallait que ça reste suffisamment flou en termes de textes... donc, dès que je veux que ce soit suffisamment flou en termes de texte, j'utilise de l'anglais... et puis dans les faits, on comprend pas... On comprend un peu, j'ai quand même fait super gaffe à la prononciation, mais bon, je ne chanterai jamais en anglais en voix lead... Ça me permet juste de mettre du relief.

On comprend que le cheminement de la jeune étudiante qui écumait avec détermination les bars de Reims l'amène aujourd'hui à livrer un album plus personnel que jamais, qu'elle a imaginé et construit de bout en bout, porté à bout de bras, autofinancé, aidée de fans aussi nombreux que généreux.

Ah oui le crowdfunding, ça, ça m'a fait tellement du bien ! J'ai eu trois concerts de proposés, dont un à Amsterdam... Il y a vraiment eu des gens qui ont soutenu sans rien avoir entendu, et longtemps après en plus. J'ai halluciné. Ça m'a fait tellement du bien, ça m'a donné aussi de la force.

[ parfois pour oublier que c'est une guitare…

je passe dans... des effets, où tu n'as plus vraiment le son de la guitare ]

Aujourd'hui, ce disque sort en autoproduction...

L'autoproduction, ce n'est pas une fatalité, c'est une culture, lançait-elle à un ensemble de journalistes et professionnels rassemblés pour un showcase de présentation du disque en amont de sa sortie, ajoutant en aparté la fierté, justifiée, qu'elle a d'avoir réussi à faire son disque de cette manière-là.

Mais je ne veux pas non plus m'enfermer dans l'autoproduction, loin de là. Je suis simplement fière de l'album que j'ai fait, tel que je l'ai fait, précise-t-elle, ajoutant tout le plaisir qu'elle a à travailler l'équipe de son nouveau label et de retrouver l'entourage d'une équipe.

C'est moi qui ai tout fait (…) qui l'ai réalisé, qui ai fait les arrangements,... tout, enfin, sauf l'enregistrement, parce que ce n'est pas juste une histoire d'appuyer sur REC, dit celle qui a, par la même occasion, repoussé les limites de l'approche de son instrument de prédilection, la guitare.

C'est hyper cliché ce que je vais dire mais je pense que c'est un rapport un peu charnel, dans le sens, quand je joue … c'est pas vraiment la guitare qui m'intéresse, c'est le son. C'est-à-dire que quand je suis dans mon studio, des fois, je mets super fort, j'adore avoir le gras du son... Même s'il y a un jeu homogène, j'ai différentes façons de jouer... pour avoir une base et m'asseoir dessus... et parfois, pour oublier que c'est une guitare… je passe dans des amplis, dans des trucs, des effets, où tu n'as plus vraiment le son de la guitare.

La démarche et l'envie de travailler différemment trouvent un point d'origine dans cette tournée de deux ans, 2011-2013, et ses 150 dates.

C'était tout le temps un peu la même chose, un son plutôt clair. En fait, je laissais le boulot au guitariste avec qui je bossais à l'époque. Il faisait ses propres parties et jouait sur moi, c'était lui qui trouvait les idées... Là, j'ai trouvé les parties de guitares additionnelles, et après, seulement, j'ai contacté le guitariste qui est venu jouer toutes les parties que j'avais faites. C'est en ça que je dis que j'ai vraiment tout fait !, souligne-t-elle.

J'ai fait toutes mes parties et j'avais pas assez de mains, ajoute Lisa, goguenarde. J'avais pas envie d'être condamnée sur les pédales pendant tout le concert, déjà que je le suis déjà un peu... J'avais pas envie que ce soit le centre de tout. Il y a quand même du propos dans ce que je fais, dans le texte, donc je veux pas être québlo sur ma guitare, et de conclure, On n'a pas besoin de montrer qu'on sait tout faire... Je lui laisse la place à partir de ce que j'ai fait, c'est pas hyper créatif pour lui mais... c'est bien... moi je ne sais pas si j'aurais l'ego assez loin pour pouvoir le faire (rires).

Entre plaisir, recherche du son et contrainte, elle n'en finit pas moins aujourd'hui par avoir un joli pédalier qui approcherait le tableau de bord d'un aviateur.

Il a gonflé juste après l'enregistrement de l'album parce que j'ai tout fait via l'ordi en passant la guitare dans des amplis et d'autres trucs... et après, en fonction des sons que j'avais utilisés, qui au final étaient un peu toujours les mêmes, j'ai acheté les pédales en fonction, sourit-elle.

[ un événement, une décision, proprement marquante...

de s'isoler pour faire le point comme peu de gens en font le choix ]

Jetée très tôt dans le grand bain, il lui a fallu apprendre à nager et surtout éviter de se noyer face à l'emballement qu'elle avait suscité lors de son passage aux Découvertes du Printemps de Bourges, qui, soit dit en passant, n'ont jamais été un gage de carrière longue pour les artistes repérés lors du premier festival professionnel de l'année.

C'était il y a dix ans, il y a quand même eu des gens qui m'ont suivi (mais) ça n'a pas non plus fait genre décollage immédiat… Après Bourges, j'ai dû travailler encore plus ! Il y a eu Le Régal, là il s'est passé beaucoup de choses, surtout sur scène.

À Bourges, je pense que j'avais une forte identité mais que je ne la connaissais pas, c'est-à-dire que je faisais les choses de manière très instinctive, analyse celle dont l'EP promotionnel enregistré à l'époque reste gorgé d'un naturel envoûtant et mérite toujours d'être réécouté.

Mais je n'étais pas prête, j'étais en recherche artistique (…) Il y avait en même temps ce mélange entre quelque chose de très affirmé et de très immature.

Un processus en tant qu'artiste qui a nécessité de prendre son temps... avec un événement, une décision, proprement marquante. La décision de s'isoler pour faire le point comme peu de gens en font le choix.

On a hésité à le raconter dans la biographie... mais j'ai passé quatre mois dans un monastère après la tournée...

… pour faire une retraite silencieuse. J'ai fait des morceaux à ce moment-là, dit-elle dans un sourire. Un peu dans le délire de cette ambiance-là.

La retraite ça m'a beaucoup aidé, pour me retrouver vraiment avec moi-même et accepter là où j'en étais… confie Lisa.

Quatre mois!!? s'interroge-t-on, entre incrédulité et admiration.

Oui et en silence total... enfin... quand t'es à table, tu peux demander l'eau... En fait, on pouvait parler mais que pour dire l'essentiel, donc pas de bavardages. Mais c'est extraordinaire de vivre ça, parce que justement ça nettoie... ajoute-t-elle, écartant avoir eu peur de se retrouver face à elle-même.

Non justement ! Tu passes par des phases... mais tu te retrouves vraiment en face de toi-même, ça peut être flippant... mais j'étais avec des gens, il y avait une communauté...

Je souhaite à tout le monde de vivre cette expérience, renchérit-elle, parce que ça fait du ménage. On a tous des protections, tout le temps, mais on ne s'en rend pas compte. Là-bas, tu les perds ces protections donc, et quand tu reviens dans le monde, t'as l'impression que tu n'as plus de peau. T'es à vif... explique Lisa, avouant néanmoins... Après, peu à peu, il faut se reprotéger... parce que, tu prends le métro par exemple... c'est hyper violent, quand tu sors de là.

Mais ce passage-là m'a permis d'accepter plein de choses, de grandir, parce que comme tu dis j'ai commencé très tôt et je pense que j'avais pas vraiment eu le temps de... et les mots de lui manquer quand il s'agit de décrire le côté sombre de la piste aux étoiles.

[ Le Régal était un disque lumineux, rock, mais un album de maison de disque

... avec ce que cela implique ]

Un processus, oui, donc, et surtout un parcours personnel de recherche de soi et de (re)définition de ses envies en tant qu'artiste qui a nécessité de prendre son temps, de reprendre ses billes, entre déception de l'expérience de label et envie de mieux. En l'occurrence, son premier album, Le Régal était un disque lumineux, rock, mais un album de maison de disque, avec ce que cela implique en termes de renoncement, de consensus et de partis pris qui échappent parfois à l'artiste, sans qu'il s'en rende forcément compte, sans pour autant non plus y voir de mauvaises intentions.

Exactement. Tout à fait. C'est le réal, Lionel Gaillardin, qui a tout fait, qui a pris en charge le truc... moi, j'avais mon mot à dire mais j'avais 23 ans (…) Il est très sympa, j'ai adoré bosser avec lui mais je pense que je ne me faisais pas encore confiance sur ma vision et puis j'utilisais pas les outils, les logiciels, pour pouvoir faire les choses par moi-mêmeSur cet album, j'avais vraiment besoin que ce soit moi qui pense... résume Lisa, au sujet d'une expérience suffisamment enrichissante pour ne plus avoir envie de faire autrement.

Tout à fait. Et c'est pour ça que je me dis en ce moment... même si c'est trop tôt pour y penser... Est-ce que ce ne serait pas mieux d'aller beaucoup plus loin dans ma recherche à moi ?

Cette recherche-là, plus technique, a pris racine au fil du temps, dans l'intervalle de ces deux disques.

Tout ce temps-là m'a vraiment permis de me plonger là-dedans, dit-elle en référence à la prise en mains des outils utiles à sa recherche d'autonomie. Chercher par moi-même et surtout revenir au live... parce qu'en fait, après Le Régal, qui n'est pas un album live, on a fait beaucoup de concerts, il y avait un son de groupe sur scène et je m'étais ditsur le prochain album... et puis... je ne sais pas pourquoi... j'ai dévié de ça...

J'ai mis du temps parce que j'ai voulu (re)bosser avec un réal... En fait, j'ai essayé plein de personnes et à chaque fois ça ne correspondait pas au truc... et je pense que je me perdais totalement dans des trucs d'arrangements, raconte-t-elle.

Et puis j'ai fait un concert l'année dernière avec guitare-batterie, et j'ai tellement kiffé que quand on est rentrés du concert avec mon batteur, on a écouté les trucs qu'on était en train de maquetter avec les autres réals et on s'est dit Mais m... !! Ça va pas du tout en fait ! C'est beaucoup trop produit, beaucoup trop lisse ! Et vu ma voix, qui n'est quand même pas rock, s'excuse-t-elle presque en souriant, (…) Si c'est trop propre ça perd de l'identité parce que je ne suis pas lisse du tout.

[ je me suis dit, pour la suite, il faut quelque chose de plus radical...

quitte à être dans un label plus petit donc je suis partie ]

Qu'elle se rassure. La Nébuleuse, l'album, est un magnifique album de pop un peu sale, aux textes parfois figurativement violents, dont deux textes parlent de mort, sans oublier celui sur l'avortement.

Ah ! pop sale, j'aime bien ça !, s'exclame-t-elle, poursuivant sur l'idée de la dureté des paroles... Je ne montre pas les tripes non plus... Il y a une certaine distance quand même pour recevoir les choses. En fait, je pense que la chanson sur l'avortement, c'est vraiment une chanson de scène pour le coup. Elle est bien sur l'album, elle a sa place mais je ne pense pas que c'est le genre de chanson que tu écoutes le dimanche matin, sourit-elle. Je ne sais pas mais c'est une chanson qui se vit et qui a vraiment un impact sur scène.

Mais oui, en effet, il y a des sujets de mort beaucoup, c'est vrai, confesse l'artiste en qui son ancien label Wagram voyait peut-être plus une Mademoiselle K bis mais qui a choisi de tout faire toute seule, de manière indépendante.

Un signe, s'il en était besoin, d'une maturité acquise bien réelle, et qui explique en filigrane que ce soit à ce moment précis que les chemins avec son ancien label ont divergé.

Quand je suis revenue de ma retraite, j'avais rendez-vous avec mon label, avec l'idée de continuer, de faire un autre album. Mais je n'étais pas du tout contente du rendez-vous.

Ils me parlaient d'electro, de Shakaponk... enfin de trucs qui n'avaient strictement rien à voir avec les existences de ma musique... et puis ils n'ont pas vraiment suivi le côté scène...

Ils n'avaient pas vraiment compris ce que je faisais vraiment. Donc je me suis dit, pour la suite, il faut quelque chose de plus radical, quitte à être dans un label plus petit donc je suis partie... en pensant que j'allais trouver très vite, se remémore-t-elle.

J'ai fait plein de rendez-vous, j'ai eu plein d'opportunités, qui n'ont pas abouties et ça a été vraiment très très compliqué en fait. Mais, c'est à partir du moment où j'ai décidé de l'enregistrer moi-même, que j'ai monté ma boîte pour le faire etc... que (le label) At(h)ome a répondu présent. C'était à partir du moment où le produit était fini, que j'avais apporté toute ma vision, que tout de suite les portes se sont ouvertes directement... c'était hallucinant!

La pratique montre que pas vraiment, en fait. Il est de plus en plus récurrent et fréquent que les labels attendent un produit fini avant de se mouiller.

Oui, mais quand c'est un chemin personnel, c'est pas évident... de te dire Est-ce que je me fais confiance jusque là ? Est-ce que je prend le risque que, même en ayant le produit fini, les portes ne s'ouvrent pas ? Parce que c'était ça aussi le risque, de me dire peut-être que ça va pas plaire... donc c'est de l'autoprod mais j'ai un vrai accompagnement derrière.

D'ailleurs, j'ai trouvé un autre tourneur directement après avoir fait cet album-là, parce que Zamora m'avait lâché sur la route...

[ Quand on est obligé d'être totalement autonome...

on est obligé de griller tous les fantasmes de célébrité ]

En fait... après l'album, j'ai trouvé les partenaires qu'il me fallait et, en plus, j'aime bosser avec eux. C'est-à-dire que c'est peut-être un plus petit label que Wagram mais c'est tellement plus agréable. On travaille vraiment ensemble, on se dit les choses, c'est très agréable, je pensais pas que ça existait,...

D'autant que les métiers dans l'industrie du disque sont encore en pleine mutation..

Exactement, on est passé d'un côté où l'artiste pouvait encore être dans le fantasme qu'on s'occupe totalement de lui...

Et Lisa de tirer déjà quelques leçons et une fierté de cette expérience sans filet pour mener à bien son deuxième album...

Quand on est obligé, en tant qu'artiste, d'être totalement autonome, on est obligé de griller tous les fantasmes de célébrité ou de je-ne-sais-quoi (...) Il y a ça aussi, le parti pris plus indé c'est évident. Je pense que ce qui est plus indé ou alternatif, c'est plus le fait qu'à l'heure actuelle, il y a beaucoup de sons electro. Là, c'est une prod assez classique au final. Ce n'est pas vraiment associé à ce qui est dans l'air du temps, parce que c'est vrai que toutes les choses qui sortent en ce moment, c'est très...

Et la principale intéressée de conclure...

... Ce n'est pas un album compliqué, il y a peu de choses, en fait. Il y a peu d'arrangements, mais comme on dit souvent... c'est dur d'être simple, d'aller à l'essentiel.

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