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10 août ~ Baptiste W. Hamon ~


l Baptiste W. Hamon l L'insouciance l

(mise à jour avec interview)

Il avait commencé par annoncer la couleur.

Quitter l'enfance, le premier six titres de Baptiste W. Hamon, affichait une maturité musicale et textuelle qui ne laissait guère de doutes et démontrait une aisance particulière avec les mots et l'univers qu'il s'est choisi... la country, et un timbre de voix qui sied particulièrement aux ambiances qui vont avec. Avec son premier album, enregistré à la source, il affirme son profil de marcheur des sentiers du folk et confirme son intention... celle de ne pas perdre sur la route de l'émancipation l'Insouciance qui va avec cette période germinale de toute une existence.

Derrière une apparente facilité à s'immerger dans le style, il y a toute l'appropriation d'un genre et de ses codes, de la pertinence et de la poésie d'une galaxie musicale à mauvaise réputation, à tord, en France, en tout cas...

Parler de country, c'est souvent s'exposer aux quolibets et au généreux raccourci d'un style qui se résumerait à Dolly Parton, ou à un vague geste de tolérance à l'évocation de noms jugés trop poussiéreux pour être modernes, tels que Hank Williams (I & II), Kris Kristofferson ou Willie Nelson... alors qu'il suffit de se pencher sur le parcours de ces artistes, dans le contexte de leurs époques pour jauger de ce qui sous-tend culturellement une musique qui relève presque de la religion aux Etats-Unis, parfois à l'excès, et souvent travestie par sa version commerciale.

Il existe, en parallèle, des artistes, comme Johnny Cash ou Townes van Zandt, que tout le monde respecte mais range soigneusement, ailleurs, mais le moins possible dans la case country, un peu comme quand, en France, a été inventé une sorte de catégorie intermédiaire pour la nouvelle chanson-rock, parce qu'il était hors de question de ranger Miossec, Dominique A, Bashung, Louise Attaque... à côté de tous les Aznavour, Brel, Delpech, et autres Eddy Mitchell...

Au sujet de tous les artistes rencontrés sur place, Baptiste confirme cette problématique de la country.

Ils se revendiquent de la country originelle mais eux utilisent le terme d'americana parce que la country aujourd'hui c'est ce qui passe à la radio, aux Country Awards, un truc super sucré (...) à côté même Dolly Parton c'est mieux. Pour moi, c'est une immense artiste, l'équivalent féminin de Johnny Cash. Je la cite souvent comme maitresse du songwriting. Comme Cash en somme, elle a su toucher le grand public avec une country de qualité.

La question qui vient immédiatement à l'esprit est de savoir comment un petit Frenchie peut succomber de cette façon aux muses telles qu'Euterpe, Terpsichore, Calliope.... Une question qui ne manque pas de lui être posée et dont la réponse, en février 2016, à Froggy's Delight est on ne peut plus éloquente...

Je suis tombé dans la country un peu par hasard vers 17 ou 18 ans par l'intermédiaire d'un chanteur qui s'appelle Townes Van Zandt dont je parle beaucoup, raconte-t-il au webzine musical. J'avais lu son nom dans une chronique à un moment où j'écoutais beaucoup de chanteurs mélancoliques comme Nick Drake ou Elliott Smith, mais qui n'étaient pas dans des registres americana. J'ai toujours eu cette appétence, cette fascination, pour l'Amérique à travers la littérature. Déjà gamin, je jouais avec des Playmobil cowboys et indiens.

L'imaginaire est, comme chacun sait, un puissant ferment de la création. L'esprit humain a cette sublime capacité au vagabondage, le fantasme nourrit et développe la créativité, et autorise le voyage, à distance ou par procuration.

Certains comme Guillaume Redeye Fresneau et Naïm Amor ont sauté le pas pour s'installer avec bonheur aux plus prêt des racines de leurs influences.

Baptiste n'a pas franchit ce pas mais continue à rêver de cet ailleurs. Il a néanmoins su profiter d'un voyage au prestigieux supermarché mondial de la musique qu'est le SXSW pour aller enregistrer à Nashville avec Mark Nevers*, qui a travaillé avec rien de moins, dans le genre, que Vic Chestnutt, Silver Jews, Lambchop, mais aussi Bonnie Prince Billy et Caitlin Rose. Le genre de carnet d'adresse qui n'aura pu que faciliter les deux magnifiques collaborations avec les deux derniers... Entendre Will Oldham accompagner en français un garçon vacher qui chante l'Yonne, autant que le Mississippi ou le Texas, est, il faut l'avouer, des plus savoureux.

Il est hyper francophile... Je crois que sa mère était professeur de français, il le parle un petit peu, se remémore Baptiste, racontant avoir assisté à des scènes où il discutait en français du dernier album de Dominique A.

J'ai choisi Mark Nevers parce qu'il avait fait plein d'albums de Will Oldham. Je lui ai envoyé des maquettes, il a écouté et dit oui.

Une fois que c'était acquis je lui ai demandé s'il n'y avait pas moyen de faire quelque chose avec des gens avec qui il avait bossé, raconte le jeune auteur français. J'ai fait une liste et Will Oldham était en dernier de ma liste... c'était un rêve complètement irraisonnable.

Il a dit oui sans poser de questions. Je lui ai envoyé la maquette, il est venu, il a passé deux heures en studio (…) on a papoté, c'était sympa et le plus simple du monde.

On a fait quelques essais. Il a une voix de fou, on a fait trois prises, on a pris la meilleure.

Pour moi, c'est un héros !! Aux États-Unis, il ne remplit pas de salles plus grandes qu'à Paris par contre pour avoir voyagé un peu il est ultra respecté (…) tout le monde le connaît parmi les songwriters de la nouvelle génération.

Ça fait partie de ces choses qui font que je suis sur un petit nuage. C'est mon premier disque, c'est mon frangin qui était fan ultime de ça, et m'a rendu fan à mon tour vers 15-16 ans, Bonnie Prince Billy, Palace Music, Palace Brothers... Je vivais un rêve éveillé... et en même temps, il y avait cette simplicité. Ils ont un rapport plus simple à la musique qui fait qu'on va faire une collaboration parce que l'idée nous plait. C'est tout.

Le résultat de ce passage par la capitale de la country, dont le travail a été finalisé au studio Poptones sous la houlette de Jean-Charles Versari, nous laisse avec un petit bijou un rien baroque pour ce qui est de la scène made in France. Le registre sémantique est romantique, littéraire et écartelé entre les States et la France d'une autre époque, avec toute une galerie de portraits de ses héros personnels.

De son répertoire aux milles visages, il traîne depuis quelques années le portrait d'un grand qu'il n'oubliera jamais et dont il a affiné le portrait au fil du temps en version studio... celui de Townes van Zandt. Un texte rare par l'axe qu'a choisi Baptiste... celui du fan rendant hommage à l'homme, à travers la manière dont il l'a découvert, et auquel il renvoie son propre parcours. Original autant que réussi.

Maintenant, la suite se prépare.

Je suis sur le 2e, on va rentrer en studio début octobre, confesse-t-il.

J'ai fait exactement le disque que je voulais faire au moment où je l'ai fait. Il est peut-être plein d'imperfections mais c'est un disque dont je serai fier toute ma vie. Les critiques presse sont largement positives, ce qui n'était pas évident avec ce style de musique.

Je pense que l'écriture (pour le suivant) a évolué, mais les thématiques ne vont pas beaucoup changer. J'aime parler d'amour, dépeindre des personnages un peu en perdition mais qui se battent pour trouver leur voie. Ça restera des chansons dans cette thématique-là.

Moi-même, j'ai grandi et mon écriture a mûri. Donc, ce sera à la fois dans la continuité et un peu différent.

* on pourra s'amuser du nom de famille de Mark, pour un français parti enregistrer aux Etats-Unis

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