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04 juil. ~ Les Glaives ~


l Les Glaives l Dans les mines l

Au Nord, c'était les corons, les mines aussi... Quoi de plus naturel, donc, pour un groupe versé dans le post-punk baroque souterrain qu'un choix de patronyme aussi combattif que Les Glaives, pour mieux tenter d'affirmer une filiation anglo-saxonne que seuls les Belges anversois ont jusqu'ici semblé intimer sans effort.

N'est pas fine lame qui veut, et dans sa quête d'une reconnaissance semblable à celle que seul Alain Kan avait réussi, éphémèrement, à obtenir en son temps, il aura fallu des changements de line up, de la persévérance et quelques errements musicaux, entre grindcore daté et punk simpliste, avant qu'un certain Rodrige Sergent ne rencontre les compagnons de route qui allaient donner les éléments de noirceurs et de culture anglo-saxonne qui siéent à sa poésie noire.

Dans cet album, passé bien entendu entièrement sous les radars de la presse nationale comme internationale, sauf apparemment en Belgique, il pourrait être dit qu'il règne un climat que seuls des membres de la nébuleuse dEUS auraient pu être capables d'injecter.

Ce destin de groupes et d'albums mythiques mais enterrés qui ne demandent qu'à être dépoussiérés et ramenés à la lumière est plus fréquent qu'on ne veut bien l'admettre. Un peu de curiosité, beaucoup de passion... et la vigilance de collectionneurs affûtés contribuent régulièrement à repeupler le panthéon des oeuvres oubliées, même s'il est malheureusement souvent trop tard pour que l'artiste puisse en tirer un quelconque bénéfice.

Dans le cas présent, tout commence avec le travail de deux passionnés, archivistes-collectionneurs, amplis de tristesse face aux quelques 6.000 disques de leurs collections respectives. Laurent Schlittler et Patrick Claudet présentent leur épique projet comme la conséquence d'un profond chagrin face au constat du nombre effarant d'albums magnifiques restés inaudibles et introuvables à l'époque d'internet. Les deux employés lausannois décidèrent donc un jour d'associer les initiales de leurs prénoms pour lancer la bien nommée LP Company et sa LP Collection. L'idée est simple : présenter, dans un premier temps, 50 trésors cachés de la musique underground...

Engoncés dans leur petit bureau dans la cité vaudoise, ils n'ont dès lors qu'une obsession, qu'une aspiration, celle de secouer le cocotier de la musique pour en faire tomber ces bijoux de pop, de punk, de rock gothique, ... injustement insoupçonnés...

Ils en étalent les pochettes, les rangent par thématiques, les habillent d'une chronique qui va bien, et finissent par inviter des musiciens du monde entier pour faire (re)vivre un répertoire hors norme à travers des reprises.

La liste fourmille de disques d'artistes du monde entier aux noms qui donnent envie, The Sophists, The Ambush, Antonov and the Mexican Spies, O'Gonzo, China Clinic… et parmi ces pépites insoupçonnées, Les Glaives, un groupe français, donc...

... sauf que cette discothèque biblique est née du pur fruit de l'imagination des deux compères qui commencèrent par créer des pochettes d'albums fictifs... de groupes aux noms inventés... et à l'histoire fantasmée... en piochant dans leurs propres ressources photographiques, des clichés pris le plus souvent dans le même bureau où ils travaillent, puis dans celle du Musée de l’Elysée à Lausanne, un musée reconverti malgré lui en studio d'enregistrement avec des bandes qui prennent la poussière, pour la fantaisie et pour filer la métaphore.

Après les noms d'artistes et les pochettes, vinrent donc les titres des chansons, et les chroniques... auto-éditées dans un premier temps puis regroupées et reformatées dans un livre paru aux éditions Le Mot et le Reste, maison de référence pour nombre de livres dédiés à la musique et ses histoires... logique pour une LP Company dont le slogan est Imagination is music*.

Un kiosque en ligne présente une sélection de ces albums parmi cette discothèque virtuelle au double sens propre du terme... Mais Laurent et Patrick n'en reste pas là et l'histoire en devient croustillante lorsque que cette musique chroniquée devient réalité par le biais d'albums tribute composés de reprises de ces disques qui n'ont jamais existé...

... dès lors, de vraies entités artistiques se mirent à créer des reprises à partir de la chronique, de la pochette et des titres affabulés. De vrais groupes que l'on connaît, ou pas, tels Anna Aaron, Nicolas Julliard, ex-Fauve*, Peter Kernel, Sinner DC, Albin de la Simone, Rodolphe Burger, Ventura, Holden, et des Parisiens dadaïstes d'Arne Vinzon... disponibles sur la page de la LP Company

... posant moult questions aussi incongrues que légitimes, explique Laurent, rencontré en marge de l'exposition installée à Lourmarin le temps d'un festival. En effet, interroge-t-il... une reprise d'un titre qui n'existe pas et dont les auteurs compositeurs sont fictifs génère des droits qui sont versés à qui ?

Mais au-delà de ce projet fantasmagorique, serait-il possible qu'autant de disques passent sous le radar des professionnels de la chronique... de toute évidence, et modestement, il doit bien y en avoir un certain nombre dans les colonnes de french-o-rama... des groupes dont certains lecteurs n'ont jamais entendu parlé... et pourtant eux existent bel et bien... À commencer par Arne Vinzon. Dont acte.

* L'imagination est musique

** L'artiste suisse appelé Fauve, avant que ne se monte le projet français

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