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20 avr. ~ Bosco creuse le sillon ~ Ep.1/3


l Bosco l Ep.1/3 l

Si le monde est une orange, la musique est comme une crevette. On peut aimer ça, mais à un moment il faut la décortiquer. Pour comprendre la musique, ai-je appris un jour auprès d'un des animateurs de ma petite radio associative de province, il faut aussi l'étudier sous l'angle de la production.

Soit. Car même à l'heure du tout-faire-soi-même, il arrive qu'un peu (beaucoup ?) d'aide soit utile, voire nécessaire, ne serait-ce que pour atteindre les objectifs de texture du son, de mise en valeur du mix et de choix d'arrangements par quelqu'un qui ait un regard extérieur plutôt que par un pile ou face ou un partage soit-disant égal du volume sonore entre tous les intervenants ?

Ce serait bien de mettre la batterie un peu plus en avant, demande le roi des fûts et cymbales. J'entends pas ma basse, dit le prince de la quatre cordes. Pourquoi vous n'avez pas gardé mon solo, interroge le virtuose la six cordes...

C'est là qu'interviennent les producteurs, barbarisme qui en français se traduirait pas réalisateurs puisqu'il s'agit à ce moment-là plus de construire un disque que de le payer. Mais ceci est un autre débat.

On connaît de grands noms à l'international mais ce savoir-faire existe aussi en France.

Un autre moyen donc de parler de la scène made in France est de se pencher sur les artistes qui font appel à ces manitous du studio...

Stéphane Bodin et François Marché se connaissent depuis l'adolescence. L'acte de naissance du duo électro-pop foutraque Bosco ne laissait pas imaginer le parcours qui a suivi.

Outre des EPs, des Snipets* électro, des remixes acidulés et deux albums... on les a vu mettre la main à l'ouvrage dans des univers aussi divers que variés.... De Prototypes à Panti Will en passant par Hematome, et aujourd'hui Blackmail,...

Ces deux bidouilleurs et leurs samplers semblent s'être donné comme dogme de ne pas en avoir, ou du moins de n'en respecter aucun tant qu'ils peuvent titiller le clash des genres qu'ils affectionnent... Sparks vs Bo Diddley, Plastic Bertrand vs Marc Bolan, B52's vs Beastie Boys...

Il suffira pour s'en convaincre de jeter une oreille aux titres Bosco meddley 1998 et Um Ty Lite.

De Bosco Action, un modèle d'imprégnation French Touch jonglant avec des influences plus plastic disco déjantées à la B.O. du film Amore Synthétique par Blackmail, on retrouve cette agilité pour le beat dancefloor, pieds en essuie-glace et déhanchés louvoyants sur une musique de joyeux Runk Pockers, un côté branleur qui fait tout leur charme.

S'ils semblent à l'aise autant dans une veine electro happy house pop, on retrouve leur patte dark electro à grosses guitares depuis plus de dix ans sur toute une série d'albums... de Frustration à This is Pop en passant par Music is Not Fun ou The Magnetix.

On fait ça depuis 2002. On avait envie de comprendre comment les autres faisaient de la musique car nous étions très bordéliques. On s’intéressait aussi de plus en plus au son, se souviennent-ils.

Travailler avec d'autres groupes en studio et les orienter, les accompagner sur des choix de productions, de mix était quelque chose qui nous titillait mais on ne cherchait pas obstinément à le faire.

La démocratisation des techniques d'enregistrement à la maison - pointées du doigt et jugées responsables de la mort du studio mythique Sound City dans le - mine de rien - documentaire d'auto-promotion de Dave Grohl, ont en soi marqué un tournant, et prouvé une certaine utilité... des deux côtés de la barrière dans le parcours de création d'un disque.

À la question de savoir quel élément a changé les choses et dans quelles proportions, la réponse se résume à la démocratisation des home-studio sans hésiter. Les plug-ins (outils et effets virtuels) ont vraiment évolué en 15 ans.

Le marché de la musique en France étant ce qu'il est, la plupart des groupes n'ont pas de budget pour enregistrer en studio avec un producteur. Il y a encore quelques années les groupes allaient dans un studio et enregistraient deux/trois morceaux maquettes dans l'espoir de trouver un label qui paye pour le reste.

Aujourd'hui ils ont donc dû apprendre à s'enregistrer et mixer leurs titres, ce qui est une bonne chose. Ça les obligent à avoir une vision plus complète de ce qu'ils font et de ce qu'ils sont. Ce qui est le cas depuis toujours aux États-Unis. Quand ils arrivent dans un studio plus "pro" avec un accompagnement (producteurs ou mixers), ils sont plus aguerris au niveau de leur son.

La maîtrise des techniques ne fait pas tout. La connaissance des musiques et la maîtrise la langue choisie est aussi un pré-requis malgré les risques ou les peurs préalables de s'exprimer en français.

Quand des artistes français utilisent la langue anglaise, c'est plus pour faire swinguer les mots, pas besoin d’être un génie pour écrire deux ou trois phrases qui claquent. Après se posent les problèmes d’accent et de syntaxe.

Le choix du français est à notre sens plus ambitieux voire casse-gueule mais aussi beaucoup plus perso.

Un conseil, pas un dogme, qu'ils appliquent à leurs productions puisqu'après Bones (2012) et Dur au mal (2015), la B.O. Ambre Synthétique** montre que le trio Blackmail, avec Sylvain Levene, transfugé de This is Pop, est passé d'une dark pop new wave à un quelque chose plus cold wave pour proposer une synthpop psychédélique en illustration de cette histoire d'amour entre une jeune femme et Antonio, son synthétiseur.

Le passage au français a été validé sur le 2e long format mais pour autant, malgré tous les arguments marketing, il est difficile de considérer cet amour synthétique comme un 3e album des Blackmail.

De fait, au regard de l'urgence de sa genèse, on est plus proche du ciné-concert que de l'album à proprement parler, un peu comme si l'on considérait Virgin Suicide comme un album de Air alors que l'on est plus proche du riff en circuit fermé.

Reste néanmoins que les titres qui animent, au sens propre comme au sens figuré, cette bande son sont autant d'indicateurs, ou pas, de ce que sera la suite de ces maîtres-chanteurs-danseurs qui réfléchissent d'ailleurs d'ores et déjà à la suite, dit-on.

Toujours est-il que l'histoire en elle-même semblait être faite pour eux, au regard de leurs quinze dernières années de fricotage sur la scène pop electro happy punk house.

* Nom d'une série TV pour enfants aux épisodes de 30 à 60 secondes, dont le nom est devenu un synonyme commun d'interlude dans les albums de rap.

**Deuxième film de Benoit Sabatier et Marcia Romano projeté en mars 2016 au Fame Festival à Paris et qui a reçu le Prix du Public.

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