6 avr. ~ Fontaine Wallace ~
Photo Fanny Béguery
l Fontaine Wallace l
Fontaine Wallace devient fontaine de jouvence pour Nicolas Falez, découvert, en ce qui me concerne avec Superflu, il y a presque vingt ans.
Lorsqu'un projet disparaît, le fan se retrouve un peu orphelin, triste de voir s'achever une histoire parfois nourrie d'amertume ou de rancœur envers le système, autrement appelé ici industrie du disque. Mais pas pour Nicolas.
En fait je vois plutôt ça comme une continuité : j'étais dans un groupe à 15 ans. Puis dix ans plus tard il y a eu Superflu autour duquel il s'est passé des trucs...
Maintenant c'est Fontaine Wallace mais je ne me suis jamais arrêté d'écrire des chansons, de jouer de la guitare, d'écouter des disques et d'aller à des concerts. C'est ce rapport direct et continu à la musique qui me porte. Pas les attributs du succès ni de la reconnaissance, confesse Nicolas.
Trois albums (...) Village Vert pour les 2 premiers albums. Puis le label belge Top Five Records pour le 3ème (...) une aventure d'une douzaine d'années... Nous n'avons pas refermé le chapitre sur un sentiment d'échec, poursuit-il.
Nous sommes restés combatifs pour trouver un nouveau label pour le 3ème album de Superflu et aussi pour continuer le groupe avec des changements de musiciens (entre Tchin Tchin et La Chance (sic) NDR).
On le retrouve aujourd'hui avec ce nouveau projet gorgé d'expérience. On se retrouve aussi avec une chanson pop luxuriante, comme on dit, qui demande de la précision et des attentions toutes particulières... presque comme de l'ébénisterie musicale, de l'artisanat. Artisanat, c'est un terme que revendiquent plein de musiciens et nous notamment.
Dès lors, agrémentés de choix d'arrangements fins et subtils qui vont bien au-delà de la posture nonchalamment charmante époque Superflu, les textes, la musique, le piano plus présent, donnent à ce nouveau répertoire une douceur et une fébrilité orchestrales, modernes et lumineuses.
On aime beaucoup travailler sur des textures sonores, bien qu'en formation classique (batterie, basse, guitare, claviers, chant) (...) On tente d'explorer plein de choeurs différents, c'est sans doute ça aussi qui peut justifier l'adjectif "orchestral".
Certaines chansons nées à l'ombre du Tancarville ont tranquillement mûri pour éclore sous la Fontaine Wallace, qui voient un piano prendre la place pour le meilleur d'une guitare un peu 90's sur Astronaute, l'Architecte gagne en urgence et met en abîme un chant à la voix plus posée, presque détachée, qui prend son temps pour interroger une époque en roue libre où chacun est se retrouve à son propre sort...
On retrouve en tout cas un Nicolas FZ au sommet de son art dans la série de cinq titres déjà publiés en ligne, avec des textes qui nous soutirent des sourires face à des rimes osées sur des paroles empreintes d'un réalisme du sens commun.
Petite Ville et Joueurs d'échecs sont un régal pour nos oreilles de la part de celui qui voit la musique comme un truc essentiel et quotidien, mais qui se voit avant tout comme un gros fan de musique, donc débarrassé du déchirement qui taraude l'artiste livrant une part de lui-même au consumateur mélomane.
J'ai plutôt tendance à rapprocher les deux situations, celle de l'artiste et celle de l'amoureux de l'art.
Je n'ai jamais été intermittent. Mon "modèle économique" a toujours été de travailler. Mais est-ce que cela fait de la musique un hobby ? Non, c'est quelque chose qui m'est indispensable et qui me manque si je m'en éloigne temporairement.
Au sein de Fontaine Wallace, on fonctionne tous de cette façon... du coup c'est un sacré indicateur de motivation quand on se retrouve à 20h pour répéter ou enregistrer en sortant d'une journée de boulot.
Cette expérience confère le recul suffisant au projet pour prendre son temps, par sagesse, sans amertume, avec passion et conviction, auréolé d'une jeunesse et d'une excitation renouvelées.
Nous sommes parcourus des frissons d'une histoire qui commence. On a envie d'avancer vite et bien. On termine un album qui sortira fin 2017 ou début 2018.
Dès le début du groupe, nous nous sommes promis de ne pas vivre dans la nostalgie d'une époque révolue. A quoi bon ressasser le 20ème siècle, période à laquelle les groupes envoyaient des cassettes à des labels qui t'envoyaient en studio si ça leur plaisait...
Dans un paysage très différent aujourd'hui, nous avons choisi d'avancer nous-même : on enregistre sur nos fonds et on diffuse notre travail sur internet tout en espérant trouver un jour un ou plusieurs partenaire(s). De ce point de vue, ça progresse mais je ne peux pas en dire plus pour l'instant, confie-t-il, laissant ainsi poindre l'idée que les choses pourraient accélérer d'ici la fin de l'année.
Il est en tout plaisant de voir que Nicolas Falez, Cécile Béguery, Fabrice De Battista et Ludo Morillon
bâtissent ce projet avec une philosophie réaliste qui laisse toute sa place à l'artistique dans une période difficile pour les petits projets musicaux faits-mains, un peu comme un peintre restitue ses images au pinceau, ou comme une photographie littéraire argentique.
L'industrie du disque a connu un séisme majeur. Restent les musiciens, les fans de musique... l'essentiel donc. Mais nous sommes heureusement des millions à penser que la musique (les livres, le cinéma) ça n'est pas que de l'entertainment.
Pas mieux.