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15 mar. ~ Oslø Telescopic ~


l Oslø Telescopic l Third / Degree / Burnt l

Oslø Telescopic est l'un des projets les plus fulgurants et les plus insensés qu'il ait été donné à un groupe français de mettre en place, et qu'un label ait accepté d'accompagner. Insensé, au sens figuré comme au sens propre, leurs trois premiers disques en avaient tous les symptômes.

L'histoire des musiques actuelles avait certes déjà enregistré dans ses tablettes les élucubrations et bricolages sonores de Beck Hanson entre Mellow Gold et Odelay, ainsi que celles de dEUS et de leurs 25 minutes de My Sister = My Clock, réputées être des chutes de studios de leur album Worst Case Scenario. Eux auraient peut-être à l'époque cité les Butthole Surfers.

Les présentations, sommaires, avec Oslø Telescopic se sont faites sur la base d'un premier disque intitulé Third, truffés de bidouillages, d'incursions folk déstructurées, de guitares 60's et western, d'instruments détunés, comme l'avait fait John Frusciante sur son magnifique ovni Niandra LaDes and Usually Just a T-Shirt.

Si le disque ne portait pas le célèbre avertissement parental de contenu explicite, son penchant Lynchien l'aurait de toute évidence empêché de clamer qu'aucun instrument n'avait été maltraité pendant sa réalisation.

Au-delà de ça, le projet était encapé d'un mystère savamment travaillé et sagement respecté, de l'identité de ses auteurs jusqu'à leurs intentions, entre concept musical ou art contemporain. Les éléments de pochettes en racontait le minimum mais le disque était accompagné de cartes de retour postal* pour être prévenus de la suite des événements.

Autre élément de mystère, ce qui semblait devoir être les trois membres du groupe apparaissaient entièrement recouverts de bandages... un indice venant appuyer le fait que le deuxième album de la trilogie qu'ils avaient planifiée devait s'appeler Degree et le troisième Burnt... Third / Degree / Burnt... brûlés au 3e degré...

Ces pros de l'image et des métiers graphiques ont même poussé le concept jusqu'à faire en sorte que les visuels des trois pochettes mis côte à côte forment une seule image, tout comme les titres apparaissaient numérotés de 1 à 15 par album et sur la totalité des titres de 1 à 45**...

Concept donc. Mais rien à redire sur la créativité première, celle qui importait... la musique.

La seule chose dont on peut à peu près être sûr est que leur manifeste consistait à sortir ces trois disques en six mois...

Entre collage sonore et performance à base de magnéto cassette, guitare électrique et batterie sur ce qui leur serait tombé sous la main, le résultat faisait sienne la presque totalité des sonorités rencontrées sur la scène indie de l'époque, entre Nantes et Rennes, à quelques exceptions près, et dont les labels étendards étaient Lithium et Rosebud. Aux détours d'extraits de films, de boucles et autres entortillements sonores divers et variés, on y retrouvait comme l'écho de titres de The Married Monk, The Little Rabbits, Diabologum, Emma, Dogbowl, Sloy, Dominique A, ... Du coup, le label au nom de thymorégulateur fondé par Vincent Chauvier, et son oreille audacieuse, semblait condamné à rendre public cette expérience de laboratoire qui s'est, il devait s'y attendre, soldée par une retentissante indifférence dans les sphères grand public et bien pensantes.

Les cercles indés s'en sont eux par contre délectés.

Une reconnaissance un peu plus ample, il faut le dire vite, a pointé le bout de son nez au 4e album pour lequel les trois Stooges de l'indy foutraque made in France avait revendiqué le kidnapping de Dominique A pour un album façon syndrøme de Stockholm, intitulé The Dominique Ø Project, beaucoup plus accessible, voire presque dansant et qui avait donné lieu à un épique concert mémorable au Café de la Danse avec prise d'otage en live de la star nantaise.

Leur retrait monastique programmé face à leur quête de célébrité avortée, ou le suicide annoncé de leur carrière fut précédé d'un album, disons, de la rémission, Short-Range Luv (For Hurry-Spider), qui pour le coup, lui, était ultra grand public par rapport au reste de la discographie, et où les scarifications musicales initiales donnaient lieu à une gaieté insoupçonnée avec un lot de titres que l'on taxera de dance floor punk.

Et histoire de finir sur une bonne note... Disons, 5 points pour l'audace, 5 points pour la créativité, 2 points pour la tenue de scène, 3 points pour les titres de chansons concepts (les titres, mais les chansons aussi) et 2 points de suture en remboursement de la Sécurité sociale... Ça fait un joli 18/20 tout ça.

* eh oui on parle d'un temps où les newsletters pouvaient encore passer par la Poste

** Oui, The Roots a employé le même procédé

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