12 mar. ~ Rebotini / Zanési ~
l Arnaud Rebotini / Christian Zanési l Frontières l
La rencontre entre deux explorateurs et archéologues de la musique électronique devait fatalement aboutir à faire tomber quelques frontières.
En premier lieu, cette matérialisation sonore de la rencontre entre Arnaud Rebotini et Christian Zanési abat celle qui est sensée séparer musiques savantes et musiques populaires.
Le premier s'est fait un nom dans l'électro sous toutes ces formes alignant au fil des ans de multiples projets aux identités distinctes, mais toujours avec une forte prédilection pour les ressources sonores analogiques et les instruments qui vont avec... Une méthode de travail et une source d'inspiration que ne niera pas le second, qui côtoie de longue date les grands noms de la musique concrète et électroacoustique, jusqu'à diriger pendant une décennie l'illustre Groupe de Recherche Musicale de l'Institut national de l'audiovisuel.
Déjà producteur à l'époque de l'album Zend Avesta (2000), Arnaud Rebotini avait mis un doigt dans l'engrenage du GRM, dont les Tools sont devenus pour ainsi dire incontournables. Dès lors, son album Music Components (2008) se charge d'attester de sa quête de sonorités originales.
Producteur radiophonique, comme le veut presque par essence l'intégration de la maison de Pierre Schaeffer, dont il fut l'élève, Christian Zanési affiche de son côté un joli panel de compositions et de collaborations, qui amenèrent les deux hommes à être voisins de compilation en 2008 (Electro Minimalism). Le temps s'est ensuite chargé de les rapprocher inéluctablement.
Huit ans plus tard enfin, ils mettent à exécution leurs envies de création à quatre mains, une rencontre qui célèbre les constructions par sédimentation, à base de briques sonores, empilées patiemment, qui échappe à tout minutage prédéfini, et qui illustre les nombreux points de convergence entre une musique de chambre créée en laboratoire par des hommes et des femmes en blouses blanches et une musique décomplexée centrée sur la fête débridée, que ce soit dans le cocon d'un club ou à l'air libre sur une scène dans des espaces plus ou moins improvisés.
Quelques mots-clefs appartenant à chacune de ces deux écoles suffisent à abolir de facto des frontières surtout abstraites, une intention que l'on pouvait retrouver dans les différentes parties de l'exposition Electrosound, du lab au dancefloor présentée l'an dernier à la Fondation EDF qui ne pouvait laisser indifférent l'amateur de sons et de rythmiques atypiques.
Entre émerveillement et fascination, on retrouve dans Frontières un kaléidoscope d'échantillons et de boucles qui servent de base à une fugue crépusculaire sur Riding the Rails, à un imaginarium psyKrautrope sur 12345678 ou une rêverie en mode transe-ports Hymn II.
... sans parler de l'universalité qui se dégage de compositions pour lesquelles il est aisé d'imaginer qu'il n'a pas toujours été facile de se décider à donner un début et une fin... Quoiqu'il en soit, loin d'être réservé à un auditoire de spécialistes, les clins d'oeils et références parleront aussi bien aux fans de Blixa Einstürzende Bargeld, Martin Suicide Rev, ou Paul Leftfield Daley... sans oublier Ralf und Florian bien sûr...