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06 déc. ~ La Blanche, La mort à Johnny ~


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Aujourd'hui ça ne va fort car aujourd'hui Johnny est mort, entonnait Eric La Blanche sur son Disque d'or qui contrairement au sujet de tous ses mots/maux ne l'a jamais été. La vie, la musique et l'injustice.

Cette chanson prophétisait l'inéluctable... la mort, tôt ou tard, d'une icône patrimoniale que tout le monde nous envie... comme le veut la formule consacrée... Dans les faits, c'est certainement vrai dans les limites des frontières du Benelux, mais se souvient-on (ou pas) de cette presse américaine qui découvrait, amusée, la nuée de journalistes faisant le pied de grue pour avoir des nouvelles de la star alitée dans un hôpital californien, ou de Las Vegas intriguée voyant débarquer des milliers d'adeptes, le coeur léger et le porte-feulle soulagé de la coquette somme de cinq à dix mille francs (oui c'était au siècle dernier) pour assister à quelques concerts de l'idole des plus-si-jeunes, adorée de pères et mères en filles et fils.

Une belle mise en abyme et forte dose d'humour en tout cas conduisait La Blanche à tourner en dérision le personnage incarné par Jean-Philippe Smet, dont le vrai nom fut cannibalisé par son double héroïque, et qui faisait de son trépas en chanson la source d'une love story...

À ce petit jeu-là, le Elvis français, comme le qualifiait la presse étrangère en ce jour de gloire de l'an 2017, collectionnait également les histoires romanesques passionnées, comme il passionnait les tabloïds hexagonaux.

Jouant avec les clichés, le texte d'Eric La Blanche masque mal, l'air de rien, le syndrome généralisé d'une admiration paradoxale qui veut que, moqué autant qu'admiré par la chronique populaire ou parisienne, nombre de musiciens, de compositeurs et d'auteurs n'ont jamais rechigné à jouer à ses côtés ou à écrire pour celui qui a longtemps posé des problèmes d'orthographe à la presse quant à savoir où placer le 'i' dans un nom de scène qui n'en contenait pas...

Un bottin éclectique de stars de plus ou moins grande envergure, de M à Charles Aznavour, en passant par Miossec, Jeanne Cherhal ou Yodelice... ont donc mis au fil des années leurs mots et leurs mélodies dans cette grande gueule d'interprète qui avait fini par se mettre à l'électro bip bip, moquait tendrement Charlie Hebdo dans l'une de ses Unes à polémiques variables.

De fait, s'il est une question, ou deux, que pose le statut de Johnny en particulier, c'est celui du profit réalisé par des personnes qui profitent, au sens premier du terme, d'un talent ou d'un contenu sans contribuer à son élaboration et sans qui il ne seraient pas grand chose. Il est également bon de s'interroger sur notre exception culturelle au prisme de la relation du fan à l'artiste alimentée par la relation, non moins perverse, des médias du grand public qui n'ont d'égale grandeur que l'étroitesse de l'enthousiasme dont ils font preuve en matière de prises de risques pour faire découvrir un plus grand nombre d'artistes naissants sous prétexte que ce n'est pas ce que le public veut... comment le public peut-il diable savoir s'il aime (ou pas) quelque chose qui ne lui est pas donné d'écouter ni même d'entendre... Sacré vieille canaille de rengaine sur la poule et l'oeuf, qu'il ne suffirait pas d'enterrer sous prétexte d'aigreur de petits artistes grenouilles sans talent qui se rêvent des carrures de boeuf.

En tout cas, même si, non, Toute la France n'est pas en deuil, le Dieu des stades a toujours suscité d'ardents débats entre fans et contempteurs et rares sont ceux qui peuvent affirmer la main sur le coeur n'avoir été touché par aucune chanson de celui qui n'en a pour ainsi dire écrite aucune.

J'entendais au petit matin des commentateurs experts qui faisaient la révérence devant une carrière de plus de 50 albums, et de milliers de concerts... mais savent-ils qu'il existe pourtant nombre d'artistes beaucoup moins renommés qui totaliseront, voire dépasseront, ces beaux chiffres à l'heure du grand bilan sans pour autant susciter la même cohorte de superlatifs, que personnellement je réserverai à d'autres artistes d'ici et d'ailleurs, de la même génération, ou plus jeune. Mais ça n'engage que moi - les goûts les couleurs tout ça.

Même s'il faut sourire du présidentiel On a tous quelque chose en nous de Johnny Hallyday... élevé au rang de Ich Bin Ein Berliner.... un million de fans ne peuvent avoir complètement tord... malgré tous les t-shirts avec chien loup, malgré un double album shakespearien, malgré les casques et blousons cloutés, malgré la reconstitution du pont de San Francisco dans le Parc des Princes avec motards Harley Davidson de rigueur... il faut bien reconnaître que la longévité de sa carrière, contre vents et marées, est simplement exceptionnelle et fait de lui cette figure emblématique de la francophonie.

Finalement, il est difficile de ne pas admettre que, hormis les royalties et ventes de disques dont vont profiter nombre de gens bien vivants qui n'ont -cyniquement ou pas- voulu que le meilleur pour lui, sa vie durant, resteront plus que quelques titres écrits parfois à contre emploi de le gendre idéal à l'image de doux voyou.

J'en voudrai pour exemple le très Hollywoodien Requiem pour un fou, façon James Dean pris dans le feu des phares d'une voiture, ou un Jean Gabin aux abois dans le Jour se lève de Marcel Carné, suggère-t-on.

Allez. Adieu l'artiste.

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